Reem Refaat Shaheen
“Je me sens en vie maintenant. Même si je ne suis pas optimiste à court terme” Reem est une créatrice de vêtements et travaille comme consultante pour le commerce équitable depuis 2006. Elle possède une ligne de vêtements ethniques. |
Reem parle des changements dans son pays et elle réfléchit sur les raisons qui pourraient freiner les effets de la révolution. Elle croit dans la révolution malgré des contretemps. Site Internet : http://www.faridaspassions.com/ Facebook : https://www.facebook.com/EthnticClothes |
Entrevue
Interviewée en anglais du 7 mai 2012 au Caire par Tatiana Philiptchenko.
Traduction et adaptation vers le français par Anthony Le parc. Révision et correction par Christine Brien Kilian. Q : Où étiez-vous le 25 janvier 2011 ? J'étais dans le Sinaï, je travaillais sur un projet de commerce équitable, je formais des gens. Rania m'a appelée vers midi et m'a dit qu'il y avait une grande manifestation dans les rues. J'étais un peu inquiète mais je me suis dit “ ce n'est pas grand chose ”. Le 26 janvier, je suis arrivée au Caire et j'ai vu les nouvelles et Rania Shaheen m'a tout raconté. Je me suis préparée pour aller à la prochaine manifestation prévue le 28 janvier 2011. Je suis déjà allée à d'autres manifestations pour les Palestiniens et pour les droits des femmes. Q : Qu'est-ce qui vous a poussé à aller dans les rues cette fois-là ? En fait, je pense que j'ai été inspirée par ce qui s'est passé en Tunisie. Q : Qu'a changé la révolution un an plus tard ? Des choses ont changé, mais nos vies ne se sont pas encore améliorées. Les graines de la liberté nous ont changés. Nous pouvons nous exprimer de différentes façons. Nous n'avons pas peur. La fenêtre est ouverte. Nous avons toujours besoin de travailler plus sur la révolution. Nos vies ne vont pas changer en quelques jours. Le système égyptien a été envahi par la corruption et la violence : ce ne sera pas facile à changer. Il y a aussi beaucoup d'intérêts étrangers en Égypte, ceux qui tirent les ficelles ne nous laisseront pas tranquilles. Mon travail et mes relations n'ont pas changé mais ma personnalité a changé. Je me sens en vie maintenant. Même si je ne suis pas optimiste à cout terme. Malgré cela, j'ai l'impression que nous n'utilisons pas toute la liberté dont nous disposons et nous devrions en profiter. Q : Concernant les femmes, que pensez-vous de la situation des femmes égyptiennes aujourd'hui ? A-t-elle changé, évolué ou est-elle restée la même ? Je pense que la situation des femmes égyptiennes n'est pas très différente de celle des hommes ; mais je pense que les changements sont assez grands pour faire en sorte que les hommes et les femmes collaborent ensemble parce que maintenant nos vies sont différentes (dans cette ère moderne). Q : Quel est le plus grand danger aujourd'hui ? Avoir un coup d'État militaire. (lire la suite à droite) |
Q : Pensez-vous que les médias sociaux et internet ont joué et jouent un rôle dans la révolution ? Et y a-t-il des changements provenant des médias sociaux en Égypte ? Les médias sociaux permettent de faire venir les gens aux manifestations, c'est très utile. Mais ils n'apportent aucun changement dans nos vies quotidiennes et aucun progrès au niveau économique. Q : Que pensez-vous des femmes qui vous représentent au Parlement ? Je m'attendais à ce que ce soit ainsi, pas une très forte représentation. Les femmes égyptiennes ne sont pas très intéressées par les questions politiques. Q : Vous voyez-vous comme une révolutionnaire ? Oui, révolutionnaire ce n'est pas seulement être active dans les rues mais aussi croire en la révolution. Et j'y crois. Q : Les femmes tirent-elles profit de la révolution ? Non, nous n'en retirons aucun bénéfice mais au moins nous ne régressons pas. Nous conservons les droits acquis dans le passé. Q : La situation des femmes maintenant est-elle mauvaise ou bonne ? Mauvaise car les femmes des couches les moins privilégiées de la population ont toujours peur de s'exprimer. Mais les hommes ont également peur. Je vois toujours la peur dans leurs yeux. Q : Les femmes ont-elles été mises de côté après la révolution ? Peut-être, il y a du vrai dans votre question, parce que les groupes islamiques ont progressé l'année dernière. Si les libéraux avaient progressé, vous auriez constaté du changement mais ça n'a pas été le cas. Q : Qu'est-ce qui vous a rendu fière l'année dernière en tant que femme égyptienne ? Je ne suis pas certaine car nous nous battons toujours. Ce qui m'a vraiment rendu fière, c'est que j'ai découvert la vraie personnalité du peuple égyptien : ils sont solidaires et bons. Ils sont très intelligents et comprennent beaucoup de choses. Ils sont très patients et c'est un peuple pacifique. Il n'est pas facile de les pousser à se battre. Ils peuvent aussi changer facilement et sont prêts à s'améliorer. Quelqu'un de mauvais peut devenir une bonne personne. |